Ce que dit la loi « Egalim » au sujet de l’obligation de fontaines à eau en entreprise
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L’eau au travail : quelle législation ?
La loi « Egalim » votée en 2018 prolonge toute une série d’articles, notamment au sein du code du travail, en faveur d’une alimentation saine et à la fois d’une démarche de réduction du plastique. Elle précise ainsi l’obligation pour les établissements recevant du public de mettre à disposition des fontaines d’eau potable accessibles qui soient raccordées au réseau – pour plus de précisions, voir notre article au sujet de la loi Egalim.
Prolonge en effet, car il est vrai que la législation française n’a pas attendu le tournant écologique de la loi Egalim pour aborder la question de l’accès à l’eau (potable évidemment) dans le milieu du travail.
Les textes de loi sont devenus labyrinthiques ; et il est difficile aujourd’hui de savoir, parmi la masse des textes promulgués, ce qu’il en est précisément de la réglementation en France. Pourtant, l’hydratation au travail demeure une question délicate et trop d’entreprises ignorent ou ne tiennent pas compte du cadre en vigueur qui a vocation à favoriser la santé des travailleurs.
On fait donc ici un tour d’horizon de ce qui est prévu dans la loi en matière d’accès à l’eau potable et fraîche. Et si, pour reprendre l’expression de Nietzsche, le diable semble se loger dans ce type de détail, il s’agit surtout de prendre en considération que négliger ces aspects peut devenir source de problèmes – en particulier à l’égard du bien-être des individus.
1. Code du travail et accès à l’eau
Deux articles du code du travail sont à prendre en compte en la matière.
En premier lieu, l’article L4121-1, qui concerne les obligations générales de l’employeur en matière de santé et de sécurité au travail. Il stipule en particulier que l’employeur est tenu de prendre « les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs » ; ce qui se traduit par une série de conseils tombant, pour la plupart, sous la coupe du bon sens :
- éviter les risques
- remplacer ce qui est dangereux par ce qui ne l’est pas, ou à défaut par ce qui l’est moins
- prendre des mesures de protection collective prioritaire aux mesures de protection individuelle
Cette ligne de conduite est précisée à l’article L4221-3, lequel prévoit que l’évaluation des risques pour la santé et la sécurité des travailleurs peut notamment comprendre « l’aménagement ou le réaménagement des lieux de travail ou des installations ».
En second lieu, l’article R4225-2 du code du travail stipule que « l’employeur met à la disposition des travailleurs de l’eau potable et fraîche pour la boisson ». Il n’est pas fait mention de fontaines à eau ici ; le terme de « fontaine d’eau potable » est en revanche convoqué dans l’article D 541-340 du décret 2020-1724 et concerne les ERP de première, deuxième et troisième catégories (voir notre article au sujet de la loi Egalim).
Ce point est précisé par l’article R4225-3 qui précise l’obligation de mettre à disposition au moins une boisson non alcoolisée « lorsque des conditions particulières de travail conduisent les travailleurs à se désaltérer fréquemment ». La liste des postes concernés est établie par l’employeur, après avis du médecin du travail et du comité social et économique (CSE) ou, à défaut, des délégués du personnel.
2. Ce que précise le Code de la santé publique
Toute entreprise a besoin d’être alimentée en eau pour ses différents usages : sanitaires, process, lavage, arrosage, etc. Par voie de conséquence, toute entreprise doit s’interroger sur la quantité mais aussi la qualité d’eau nécessaire à son activité.
Si les entreprises sont généralement alertées sur la question écologique des eaux usées qu’elles peuvent éventuellement rejeter, peu savent en revanche qu’aux yeux du code de la santé publique, le raccordement au réseau public est obligatoire et qu’il est interdit aux établissements de délivrer une autre eau que celle de la distribution publique – à moins de bénéficier de dérogations exceptionnelles accordées à des fins sanitaires et alimentaires lié à un captage privé en zone agricole ou naturelle (pour plus de renseignements, voir le dossier de l’ARPE, l’Agence Régionale pour l’Environnement).
Le règlement en effet déterminé par la nécessité de répondre aux limites et références de qualité de l’eau potable telles que définies aux articles R. 1321-2 et R. 1321-3 du code de la santé publique. Limites et références qui doivent être respectées au point de conformité en sortie des robinets normalement utilisés pour la consommation humaine (voir l’article R. 1321-5 de ce même code).
À ce titre, on peut préciser qu’offrir ou vendre de l’eau à destination de la consommation humaine sans s’être assuré qu’elle répond aux normes de potabilité revient à s’exposer à un an d’emprisonnement et 15 000 euros d’amende en vertu des dispositions précisées par l’article L1324-3 du code de la santé publique.
3. Les contraintes en termes d’hygiène
Lorsque nous contactons des entreprises pour leur proposer nos services et nos modèles de fontaines, nombreuses sont celles qui se contentent de botter en touche en arguant que leurs employés ont déjà un accès à l’eau potable, et ce grâce à un robinet installé dans des sanitaires.
Si, en effet, le code du travail n’énonce aucune obligation explicite quant à l’installation d’une fontaine à eau, en revanche son cadre est beaucoup plus serré qu’il n’y paraît sur base de ces quelques indications. Car il faut bien prendre en compte, selon l’article R4225-4, qu’il incombe à l’employeur de déterminer « l’emplacement des postes de distribution des boissons, à proximité des postes de travail et dans un endroit remplissant toutes les conditions d’hygiène ».
Cette disposition souligne bien, en accord avec les premiers articles cités plus haut, que l’employeur a bien pour obligation – en matière de santé et de sécurité au travail – d’organiser une distribution de l’eau potable et fraîche en prenant en compte les risques de contamination.
Il va de soi, à cet égard, que des sanitaires ne peuvent remplir en aucun cas les conditions d’hygiène nécessaires pour répondre aux conditions de la loi…
Enfin, on peut souligner que ce dernier article énonce également qu’il appartient à l’employeur de veiller « à l’entretien et au bon fonctionnement des appareils de distribution, à la bonne conservation des boissons et à éviter toute contamination » – ce qui renforce l’enjeu de disposer de distributeurs d’eau agréés.
4. La notion d’eau « fraîche »
Il faut également revenir sur un détail de la formulation de l’article R4225-2 du code du travail – après tout nous défendons l’idée que le diable s’y cache allègrement –, en particulier la précision « eau fraîche » apportée à l’obligation de l’employeur de pourvoir l’accès à l’eau potable pour ses employés.
Qu’entend-on en effet par eau fraîche ? Le critère aux yeux de la loi ne peut évidemment être celui de l’appréciation subjective. Et en effet une lettre ministérielle du travail (numéro 14-3-63, UN n°25 du 20/06/1963) apporte cette clarification : une eau fraîche présente une température comprise obligatoirement entre 9°C et 12°C – ce qui exclut la possibilité de se replier sur l’eau tempérée du réseau en sortie d’un robinet.
La notion d’eau fraîche suppose ainsi un système de réfrigération pour obtenir la température souhaitée, qui n’est pas une forme de luxe mais bien un besoin de rafraîchissement à prendre en compte à la même mesure que le besoin d’hydratation, du point de vue du bien-être.
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Ce détour par la législation en vigueur permet de rappeler que l’existence des entreprises qui louent des fontaines à eau est d’abord une réponse à l’exigence d’offrir, en France, un cadre de travail soucieux de préserver la santé des personnes et de veiller à ce qu’elle puisse bénéficier d’un environnement épanouissant. Elles garantissent l’exigence d’une hydratation qualitative, sans laquelle aucune santé rayonnante n’est possible.
À l’aune de nos connaissances actuelles sur la relation intime entre l’eau et la santé, la loi se restreint à établir ses directives à partir des critères objectifs sur laquelle la science s’appuie avec certitude : en particulier la potabilité, qui est un concept fondé sur des normes physico-chimiques faciles à mesurer.
Cependant, promouvoir l’épanouissement de la vie au quotidien peut dépasser largement ces aspects matériels et s’appuyer sur ce que l’on appelle la dynamisation de l’eau : ce processus suscite à l’heure actuelle de vives controverses malgré les preuves expérimentales qui abondent de plus en plus, mais il cherche à rehausser la qualité de l’eau sur un plan différent de sa composition, afin de soutenir la vitalité (voir notre débat : « La mémoire de l’eau expliquée en deux minutes ou presque » et nos travaux de recherche).